Hier, Mamie Paulette a sorti pour moi les très vieilles photos de la famille. Sur les plus anciennes, les ancêtres fixaient l'objectif sans sourire, presque effacés. On aurait dit qu'ils avaient dû traverser des brouillards d'oubli pour que leur image pâlie arrive jusqu'à nos yeux. Un peu comme cette vidéo qui date des années 70. Il s'appelait Victor Jara. C'était un poète et un chanteur chilien. Lors du coup d'état, on l'a enfermé dans un grand stade, et des témoins ont raconté que les soldats l'avaient torturé, longtemps, puis ils ont brisés ses doigts à coup de crosse, ses doigts précieux de guitariste. Ensuite, ils l'ont tué.
Dans les rues de la ville il y a mon amour. Peu importe où il va dans le temps divisé. Il n'est plus mon amour, chacun peut lui parler. Il ne se souvient plus; qui au juste l'aima?
Il cherche son pareil dans le voeu des regards. L'espace qu'il parcourt est ma fidélité. Il dessine l'espoir et léger l'éconduit. Il est prépondérant sans qu'il y prenne part.
Je vis au fond de lui comme une épave heureuse. A son insu, ma solitude est son trésor. Dans le grand méridien où s'inscrit son essor, ma liberté le creuse.
Dans les rues de la ville il y a mon amour. Peu importe où il va dans le temps divisé. Il n'est plus mon amour, chacun peut lui parler. Il ne se souvient plus; qui au juste l'aima et l'éclaire de loin pour qu'il ne tombe pas?
Léonard Cohen est aussi (surtout?) un poète. Voici la trad d'une chanson trop belle qui me parle... (Spécial dédicace pour D. ) That's No Way To Say Goodbye I loved you in the morning,
our kisses deep and warm, your hair upon the pillow
like a sleepy golden storm, yes, many loved before us,
I know that we are not new, in city and in forest
they smiled like me and you, but now it's come to distances
and both of us must try, your eyes are soft with sorrow, Hey, that's no way to say goodbye.
I'm not looking for another
as I wander in my time, walk me to the corner,
our steps will always rhyme you know my love goes with you
as your love stays with me, it's just the way it changes,
like the shoreline and the sea, but let's not talk of love or chains
and things we can't untie, your eyes are soft with sorrow, Hey, that's no way to say goodbye.
Ce N'est Pas La Bonne Façon De Dire Adieu
Je t'aimais le matin, Nos baisers forts et chauds Tes cheveux sur les draps Une tempête d'or endormie Oui beaucoup ont aimé avant nous Je sais que nous ne sommes pas les premiers Dans la ville et la forêt Ils souriaient comme toi et moi Mais à présent ils se sont éloignés Et nous deux nous devons essayer Le chagrin attendrit tes yeux
Hey ce n'est pas la bonne façon de dire adieu
Je ne recherche personne d'autre Alors que j'erre jour après jour Accompagne-moi jusqu'au coin de la rue Nos pas s'accorderont toujours Tu sais, mon amour part avec toi Comme ton amour reste avec moi C'est seulement leurs chemins qui changent Comme la limite de la grève et de la mer change avec les marées Mais ne parlons pas d'amour ou de chaînes Ou de choses que nous ne pouvons défaire Le chagrin attendrit tes yeux
Hey ce n'est pas la bonne façon de dire adieu
Les dimanches poétiques sont une initiative de Celsmoon, initiative partagée maintenant par :
Un jour, pour mon annif, je devais avoir 8 ans, j'ai invité les copines pour un goûter. Elles sont toutes arrivées avec leur petits cadeaux. Sur sept copines, quatre m'avaient offert une poupée: Barbie Sirène, Barbie golfeuse, Barbie range rover...Barbie teuffeuse! Heureusement, Violette avait innové : Sa mom' m'avait déniché un magnifique déguisement de Fantomette...
Je les avais oubliées, ces poupées... jusqu'à dimanche dernier...
C'est une chanson, et un poème aussi. C'est ma contribution aux dimanches poétiques.
Les coeurs purs (Jean-Roger Caussimon/Eric Robrecht)
Ils ne sont pas encore amis Des notaires et des notables Ils ne sont pas encore admis A dîner, le soir, à leur table Ils ne sont pas encore polis Comme Papa le fut toujours Ils ne sont pas encore salis Par les combines au jour le jour...
Mais on leur dit que ça viendra Et, bien sûr, ils ne le croient pas Les coeurs purs Les coeurs purs...
Ils ne sont pas encore rusés Ni blasés d'être un peu bohèmes Ils ne sont pas encore usés Par le métro des matins blêmes Ils ne sont pas encore conscrits Bien qu'ils soient souvent "engagés" Ils ne sont pas encore inscrits Ni au chômage, ni aux congés...
Mais on leur dit que ça viendra Et, bien sûr, ils ne le croient pas Les coeurs purs Les coeurs purs...
Ils ne sont pas encore lassés D'écouter chanter leur idole Ils ne sont pas encore blessés Par le Temps qui tant nous désole Ils chantent des "songs" sur un banc Ils n'ont pas honte de la rue Ils ne sont pas encore perdants Ils ne sont pas encore perdus...
Mais on leur dit que ça viendra Et, bien sûr, ils ne le croient pas Les coeurs purs Les coeurs purs...